C’est reparti pour un petit dialogue schizophrénique…
- Oouhlà ouhlà ! pourquoi tu fais les cent pas ?
- C’est pour faire voler les franges !
- Oh arrête de faire l’enfant !
- Quoi t’aimes pas ?
- Bah si… installe-toi et dis-m’en un peu plus
- Bon d’accord, tu vois c’est Carmine, la première fois que j’ai feuilleté ce catalogue le magazine 64 de Rowan, cette veste de Martin Storey m’a directement tapé dans l’œil. Et je me suis mis en tête de la faire. Alors, oui, je sais, elle est assez spéciale, mais je l’aime. Cela contrebalance les gilets classiques comme Lull. Il faut un peu de tout.
- Oui et en plus c’est un jacquard.
- Oui, j’ai besoin de mes petits défis. Après la dentelle, je suis attirée par les jeux de couleurs. Mais j’ai quand même appréhendé les choses autrement que pour mon gilet boulet
- Ah bon ?
- D’abord, je me suis documentée sur les différentes façons de travailler le jacquard. Et une façon de faire que j’ai jugée intéressante, c’est de tenir un fil dans chaque main. L’avantage en procédant de comme ça est qu’on ne doit pas croiser les pelotes quand on croise les fils, c’est un gain de temps non négligeable. En prévision, j’avais d’ailleurs à l’occasion travaillé mon tricot avec le fil à gauche.
- Ah ! pas mal….
- Pour accrocher les fils flottants, J’ai procédé de manière classique dans les premiers temps en croisant le fil tous les 4…5 mailles puis j’ai fait des croisements plus fréquents ensuite et en particulier pour les manches pour que les fils flottants à l’intérieur n’accrochent pas. Le résultat est en effet moins « accrocheur » mais aussi et c’est sans importance sans doute moins joli sur l’envers, je trouve. En fait, l’envers est le négatif de l’endroit mais avec les croisements tissés là on ne repère plus le dessin du tout et puis je me demande si ce n’est pas un peu moins net sur l’endroit. C’est un détail de finition…
- Une légère tendance à la maniaquerie ?
- Euh…parfois, peut-être. Bref, maintenant j’aime bien tricoter les jacquards. Celui-ci était cependant assez difficile dans le sens où le schéma n’est pas répétitif sur un rang. Il faut suivre attentivement le dessin. Et quand on se retrouve sur un rang envers, la visibilité du dessin est amoindrie par les fils flottants. Donc j’ai dû parfois corriger une ou deux mailles au rang suivant.
- J’ai fait la plus petite taille parce que c’est un modèle déjà assez large j’ai juste ajouté quelques mailles pour obtenir la continuité parfaite du dessin, mais comme d’habitude plus court, et heureusement, sinon, ça aurait presque traîné par terre.
- Ah ça c’est la chance d’être un petit format, t’en fais toujours un peu moins et c’est plus vite fini!
- Ah, oui, comme quoi, il y a des avantages. En plus, c’est quand même un fil assez gros, donc, ça avançait assez bien
- Et justement, c’est quoi comme fil ?
- C’est Kid Classic, franchement, c’est un bonheur ! Beau, chaud et si doux que tu le portes avec plaisir à même la peau. Je l’adore ! Touche…
- Ah oui, trop doux ! Et pour le choix des couleurs ?
- Le magazine 64 est sorti alors que Rowan fêtait ses 40 ans. Il a donc été demandé à ses designers de suivre le thème du rubis. J’ai eu envie de jouer le jeu en gardant la couleur rouge mais j’ai quand même choisi ma combinaison de couleur à moi.
- Ben c’est pas passe-partout mais c’était pas le but je suppose, et ces franges partout, ça fait un peu pièce de haute couture, c’est pas tout le monde qui porterait ça…
- Ah ben oui, parlons-en des franges. Pour des finitions, ce n’est pas une mince affaire ! En bas, comme le long des devants et de l’encolure, on relève des mailles et on travaille quelques rangs en point mousse. Alors, déjà, pour relever autant de mailles et bien les répartir, dans le bas, c’est facile parce que c’est par rapport au nombre de mailles montées mais le long de l’encolure, il faut mettre des repères pour tomber juste ! Après, les franges sont en quelque sorte, une façon de rabattre les mailles.
- Hm… hm, développe
- En fait, chaque frange est faite de 3 mailles tricotées à l’endroit en reglissant chaque fois les mailles de l’autre côté d’une aiguille double pointes. Je dois dire que j’ai laissé l’ouvrage de côté assez longtemps avant de m’y attaquer, un peu refroidie à l’idée de tout ce chipotage. Une aiguille circulaire est une aiguilles double pointe mais glisser chaque fois les trois mailles le long de tout le fil me décourageait surtout pour 201 franges de 26 rangs chacune ! Bref, j’ai acheté des aiguilles double pointes courtes et ça a été tout seul, le tout était d’attraper une routine la plus efficace possible entre le changement d’aiguilles et le comptage des rangs. Bon, il faut comprendre aussi qu’il y a évidemment 2 fils à rentrer à chaque frange (sur Ravelry, ils préviennent qu’on aura besoin de plusieurs jours et plusieurs programmes ou films à « binge-watcher » pour faire toutes les franges).
- Ouhlà !
- Et bien c’est marrant mais, en définitive c’était assez gai à faire les franges, avec le petit côté addictif du « allez, encore une… » Je pense que ça peut être une chouette idée pour terminer une écharpe par exemple.
- Ah ! excellent !
- Comme d’habitude, j’ai fait le dos et les 2 devants en 1 pièce, les manches en rond et assemblé les épaules à 3 aiguilles. L’assemblage final se réduisait donc aux emmanchures. Mais évidemment après avoir traîné pour faire les franges, j’ai traîné pour assembler les manches. Les bordures en jacquard sont quand même un peu moins régulières que des bordures classiques, donc je n’étais déjà pas franche. Et puis il faisait très chaud, donc pas d’urgence à le finir. Pourtant, il est arrivé un moment où j’en ai eu marre de le voir traîner et un beau weekend pluvieux fut l’impulsion qui manquait.
- Et voilà, commencé le 14 décembre 2018 , j’ai terminé ce gilet le 27 juillet 2019. Heureusement entre temps j’ai fait d’autres choses.
- Et au final ?
- Ah, il est chaud, il est doux, il est super enveloppant. Comme je suis frileuse, je l’ai déjà beaucoup porté. Un petit frisson le soir ou le matin et hop, je m’enveloppe dedans pour mon plus grand plaisir.
- Ah ! Les petits plaisirs de la vie… à la prochaine…
Mon gilet Carmine
Il est magnifique . . . . quel travail . . . . super
Merci Nadine.
Quel travail magnifique et quelle patience!! Félicitations! bel article aussi et belles photos!
Merci Patricia 🙂 Mon photographe cette fois-ci c’était Sabin, ça n’a pas été facile, mais il s’est bien débrouillé.
De la pure folie…. mais quel résultat ! Super !
Merci Béatrice. Un peu de folie de temps en temps, ça pimente les choses 😉